Bugs et jardinage

Nous sommes rentrés de Lille Dimanche dernier. Les enfants, mon chéri et moi sommes montés dans le TGV à la gare de Lille Europe. Je suis descendue à la gare de Massy-Palaiseau pour aller chez ma soeur, car j’avais une réunion de travail à Paris le lendemain, et le reste de la famille a continué son chemin vers Bordeaux.

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Petite Sirène et Petit Chat dessinent dans le train

J’ai passé une bonne partie de la journée avec ma soeur et son copain. On a papoté, bu du thé, et je me suis préparée pour la journée du lendemain, qui consistait en fait en une série d’auditions pour un poste de maitre de conférences dans un laboratoire de mathématiques. Je voulais connaître tous les dossiers avant d’entendre les gens présenter leurs travaux. L’appartement de ma soeur est un deux-pièces. J’ai donc dormi dans le salon. Vers cinq heures du matin, ma soeur est arrivé avec un sac de couchage: son copain ronflait et elle n’arrivait pas à dormir. On s’est rendormies toutes les deux dans le grand canapé lit. C’était rigolo. J’avais l’impression de revenir à l’époque de notre enfance.

Quand je suis revenue à Bordeaux, j’étais très motivée pour avancer ma recherche. C’était certainement dû au fait que je n’avais presque pas bossé la semaine à Lille, ainsi qu’au fait d’avoir écouté toutes ces auditions, où des jeunes chercheur.se.s passionné.e.s nous présentaient leurs travaux. J’avais envie de me renseigner sur plein de sujets qui avaient été mentionnés lors des auditions, et  que je ne connaissais pas, ou peu. Mais comme je suis – parfois- un être raisonnable, j’ai plutôt cherché à trouver un bug dans mon code de simulation, qui me posait problème depuis, euh…, des mois. Après un jour et demi de lutte acharnée (oui oui, c’est comme ça que je le vis!), j’ai fini par le trouver, et ça m’a procuré un immense soulagement. Déjà parce que la cause de ce bug ne compromettait pas la qualité des résultats déjà obtenus, ce qui est rassurant, et aussi parce que j’ai eu l’impression d’avancer significativement, pour une fois. En recherche on a beaucoup de moments à tatonner, d’autres où on bloque purement et simplement, d’autres encore où on est trop fatigué, découragé, distrait etc, pour se concentrer comme il faut. Et il y a aussi des moments heureux où on comprend quelque chose pour la première fois, ou bien où on résout un problème qui nous a beaucoup donné de fil à retordre. Ils sont moins nombreux, mais très sympas. (Et au jour le jour, il y a, au moins pour moi, la motivation enfantine d’apprendre des choses étranges et amusantes, et d’essayer de résoudre des sortes d’énigmes, qui me pousse au travail le sourire au lèvres presque tous les matins, que je bloque sur ma recherche ou que j’avance…). Après la résolution de ce bug, je me suis attaquée avec plein d’enthousiasme, voire d’euphorie, à une preuve de convergence que j’avais tout juste abordée il y a quelques mois. A l’époque, j’avais griffonné quelques feuilles de papier, et les avais rangées avec l’impression d’avoir bien compris comment aborder le problème. Pourtant, cette fois-ci, non seulement je n’ai pas réussi à me relire, mais j’ai surtout eu l’impression que j’étais à l’époque complètement à côté de la plaque,  et je n’ai pas trouvé la moindre idée pour me débloquer. C’est la vie!

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Le  lilas a fleuri pendant les vacances. C’est ma fleur préférée!

Et ce week-end, nous nous sommes bien activés dans le jardin: mon chéri a passé la tondeuse, j’ai débroussaillé un nouvel emplacement du potager, et nous avons planté des pommes de terre, semé des graines de concombres, de tomates cerise et de chicorées. Nous avons également contemplé les antennes d’un gros escargot réveillé de sa sieste par nos entreprises terreuses. Pendant que je ratissais la terre du potager et enlevais les racines des mauvaises herbes, je me disais que c’était un travail très proche de mon débuguage de code de la semaine: un peu long, un peu hasardeux, mais nécessaire pour obtenir un résultat concret. Ceci dit, nous sommes des débutants complets en jardinage, et je ne sais pas du tout à quel résultat m’attendre. Je guette l’apparition des premières pousses de carottes ou de marguerites avec espoir….

 

 

 

 

Les vacances, les vacances!

J’ai du mal à écrire ici ces derniers jours: ma fin d’année est – comme pour presque tout le monde je pense – très très remplie, et je passe tellement de temps à penser à tout ce que je dois faire que je n’arrive pas toujours à décrocher assez pour rédiger un petit post. C’est un peu bête, mais c’est vraiment ce qui se passe! Ca me gêne un peu de dire ça, parce que j’adore vraiment mon boulot, mais je suis contente d’avoir une pause avec les vacances de Noel. Je ne me sens pas trop fatiguée physiquement, contrairement à l’an dernier (les bonnes nuits de ces derniers mois ont fait merveille), mais un peu en surchauffe mentalement. Ca m’énerve de me sentir comme ça, parce que je sais bien que j’ai un métier super sympa avec des horaires plutôt souples. Donc je ne devrais même pas avoir ce sentiment….Oui mais je fais ce métier parce que je suis un peu barjo, et donc j’en fais beaucoup plus que ce que je devrais, et surtout, j’ai beaucoup beaucoup beaucoup de mal à décrocher quand je quitte le bureau.

Heureusement, pareille situation a d’habitude beaucoup plus d’avantages que d’inconvénients. Mais avec ce semestre qui a filé comme le vent, je me demande plusieurs fois par jours: comment vais-je faire pour tenir à peu-près les objectifs que je me suis fixé cette année? Il faut préciser que je peux être très efficace à certains moments mais que j’aime avant tout beaucoup rêver: à de nouveaux sujets de recherche, à des idées un peu fofolles… Et hop, je me renseigne ensuite avec une petite recherche internet, je lis des articles de recherche sur des sujets inconnus… au lieu d’écrire des articles ou bien faire de nouveaux tests pour les méthodes que je développe. Sans doute faudrait-il que je fasse davantage preuve de réalisme. Mais c’est tellement sympa de jouer à chercher des solutions nouvelles et rigolotes.

Je suis une fille plutôt calme (je pense que c’est ce que la plupart de mes amis pourraient dire), je n’ai pas du tout l’air hyperactive au sens habituel. Pourtant je me suis rendue compte l’autre jour, en patientant chez le notaire pour signer l’acte de vente de notre nouvelle maison, que j’avais vraiment beaucoup de mal à rester assise sans bouger. De fait, à mon bureau, je me lève toutes les cinq-dix minutes, pour porter un papier à la poubelle, chercher de l’eau, passer voir quelqu’un…peu importe la raison, j’ai besoin de me lever et de marcher.  Chez le notaire, il n’y avait pas d’échappatoire, j’ai passé deux heures et demi assise sans même pouvoir griffonner sur une feuille, et à la fin j’avais juste envie de me lever et de partir en courant. Cela m’a rappelé quand j’étais élève ou étudiante, et qu’au bout d’un certain temps passé en position assise, je décrochais complètement: à l’époque je pensais que c’était juste parce que je n’étais pas très concentrée, mais maintenant je pense que c’est aussi que j’aurais eu besoin de me dégourdir les jambes. Il faut que je pense à ça quand je donne mes cours 🙂

Sinon, avec les fêtes qui approchent, il y a plein de sélection de livres un peu partout, et qui me font très envie, aussi bien pour moi (ou pour mon chéri) que pour les enfants. Ce week-end j’ai, non pas dévoré, mais englouti un roman de fantasy bien écrit et très marrant (« Au service surnaturel de sa Majesté », un roman léger mais très chouette). Ca m’a fait très plaisir de me plonger comme ça dans un livre, et d’en tirer autant de plaisir. J’ai bien l’intention de recommencer pendant les vacances.

 

 

Programme de recherche

En ce moment, je me pose des questions sur mon programme de recherche.

La recherche, c’est lent, la plupart du temps. On tatonne, on essaie de comprendre, on essaie de formaliser ce qu’on a compris, on relit pour vérifier qu’il n’y a pas d’erreurs. Et forcémement (dans mon cas au moins, mais je ne suis certainement pas la seule!), il y a des erreurs. De signe, de programmation, de coefficient, de sens…

Tout ça pour dire que même si mon boulot, c’est en grande partie de faire de la recherche, il vaut mieux savoir clairement ce qu’on cherche, et être convaincu de l’utilité (relative), parce qu’on n’a pas de temps en trop pour mener à bien tout ce qu’il faudrait, ou tout ce qu’on voudrait…

Et ces derniers temps, je m’interroge de plus en plus sur l’utilité de ce que je fais, et sur mes priorités scientifiques.

J’ai l’impression qu’on peut travailler pendant des années, si on a le nez dans le guidon et qu’on ne prend pas trop de recul sur ce qu’on fait, sur des choses qui finalement ne sont pas très utiles. Il y a aussi une question de goût propre: certains sujets, certaines techniques, certains styles me font plus vibrer que les autres.

Et tout ça rentre parfois en conflit avec mes recherches actuelles, et les priorités de mes collègues, de mon chef d’équipe. Il faut faire le tri entre des propositions de collaborations qui pourront m’épanouir scientifiquement, et celles qui me feront perdre du temps. Il faut tenir compte du fait que mon chef n’a pas les mêmes goûts que moi, et ne comprend pas forcément mes aspirations, voire m’instrumentalise si ça l’arrange…

Je cherche ces sujets qui m’inspirent, et du temps pour travailler dessus. Les sujets qui m’inspirent, j’en trouve sans peine… En fait, le problème c’est de dégager du temps, de marquer des priorités. De savoir dire non à certaines choses et d’être efficace…

Encouragement

Cet après-midi, j’avais un rendez-vous en visioconférence, pour discuter avec d’autres chercheurs et des industriels de l’intérêt  de monter des projets pour répondre à des appels d’offres nationaux. Bref. Deux personnes représentant des sociétés privées ont présenté leurs projets, et après, l’animateur a demandé si d’autres personnes avaient des choses à présenter. J’avais quelques transparents, mais c’était davantage pour présenter les activités de mon équipe que pour faire part d’un projet mûrement réfléchi. Et je n’osais pas trop me lancer, pour être honnête.

C’est alors qu’une autre participante, une femme plus agée que moi, anciennement directrice de mon centre de recherche, est intervenue en disant que j’avais des choses à présenter…J’ai donc rebondi sur ses paroles et présenté rapidement nos thématiques de recherche. Ca m’a un peu exposée, je ne sais pas si j’ai fait un bon effet ou pas, mais au moins j’ai essayé…et c’est grâce à cette femme. Je ne sais pas si elle l’a fait par solidarité féminine, mais en tout cas je lui en suis reconnaissante, et je ne suis pas sûre qu’un collègue masculin me connaissant aussi peu aurait pensé à faire ça.

Ce n’est pas la première fois que je bénéficie d’un léger encouragement de la part d’une femme chercheuse plus expérimentée. A chaque fois, ça me fait très plaisir. J’en parlerai sans doute bientôt, mais nous sommes peu de femmes dans ce milieu de la recherche scientifique, et le plafond de verre n’y est pas un mythe. Alors ces encouragements, même discrets, me font du bien.

Résultats numériques

Pour passer à des choses moins sombres que les deux billets précédents, je viens de faire des progrès significatifs dans un de mes travaux de recherche. Depuis bientôt deux ans, j’essayais (pas à plein temps, mais de manière très régulière), de mettre au point une méthode (mathématique) numérique pour calculer de manière approchée comment évoluent deux fluides en interaction tels que l’eau et l’air (donc très différents) et leur interface.

Je ne vais pas utiliser ici de jargon incompréhensible. Disons juste que mes tests de validation, jusqu’à présent, montraient que la méthode « crashait » dans certains cas et donnait donc des résultats aberrants, à cause d’un manque de stabilité. Il y a quelques jours, j’ai remis à plat toute la construction de ma méthode, pour la simplifier, et depuis, ça marche beaucoup beaucoup mieux. Ce n’est pas encore tout à fait ce que je veux, mais j’ai enfin l’impression de ne pas être trop loin du but.

C’est un travail de longue haleine, plus long et difficile que la plupart de mes travaux de recherche jusqu’à présent, mais à l’intérêt scientifique plus affirmé il me semble. Evidemment, je ne vais pas révolutionner la science avec, mais si ça marche je serai contente de cette contribution.